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Enzo Fernández, le musicien de l’Albiceleste

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Pablo Esquivel a eu deux visions. La première il y a plus de 15 ans, à La Recova de San Martín. Il a vu un petit enfant de cinq ans (cinq ans !) différent des autres, il l’a vu comme un leader, il l’a vu à River. A ce même garçon, désormais âgé de 21 ans, il a envoyé un message sur WhatsApp pour lui dire de frapper au but, et qu’il allait marquer. Ce jeune joueur était au Qatar, partagé entre la joie d’avoir fait ses débuts dans une Coupe du monde avec l’équipe nationale argentine et la douleur de la défaite inattendue contre l’Arabie Saoudite. Il est entré en jeu une nouvelle fois contre le Mexique et a fait ce qu’on lui a dit, il a tiré au but. Aujourd’hui, tout un pays parle du golazo marqué par Enzo Jeremías Fernández.

Né le 17 janvier 2001 à San Martin, dans une famille ouvrière et fanatique de River Plate, Enzo Fernández doit son prénom à l’idole du club, Enzo Francescoli. Sa relation avec le ballon a officiellement commencé à l’âge de cinq ans au Club La Recova de San Martin. C’est là qu’il a été découvert par Pablo Esquivel, qui travaillait alors pour l’école de foot du club General Guido : « Enzo jouait avec l’équipe des 2000, et à l’âge de cinq ans, il faisait déjà la différence. Il était le leader, il faisait des passes très précises. Je pouvais voir qu’il était sur la bonne voie grâce au caractère qu’il avait déjà. Nous avons été très surpris par sa capacité à faire tout ce qu’on lui demandait ».

Enzo Fernandez avec ses parents Raúl et Marta
Enzo Fernandez avec ses parents Raúl et Marta

Enzo a attiré l’attention de Pablo, qui travaillait avec les catégories jeunes de River. Dès lors, Esquivel ne l’a pas lâché jusqu’à ce qu’il joue pour le Millo. Il a déclaré à TyCSports.com : « J’ai parlé à Gabriel Rodríguez, le coordinateur général, et je lui ai dit qu’il y avait un petit à La Recova qui était excellent, que nous devions le recruter. J’ai commencé à enquêter sur l’endroit où il vivait et je suis allé chez Enzo pour parler à Raúl et Marta, ses parents. Il allait à l’école maternelle. Au début, ils m’ont dit non, car ils pensaient qu’il était trop jeune pour jouer sur un terrain de football à 11. Nous avons discuter, mais cette année-là, ils ne l’ont pas fait signer. Heureusement, ils l’ont pris l’année suivante ». L’histoire d’Enzo avec La Banda a alors commencé.

Enzo Fernández « le musicien »

Raúl, son père, a raconté dans une interview que, durant ses premières années à River, Enzo était surnommé le « Musicien », « parce qu’on disait qu’il dirigeait l’orchestre ». À l’âge de 9 ans, il est entraîné par Bruno Quinteros, qui, le caractérise comme un joueur surdoué : « Il était le 5 de l’équipe. Il a toujours été un leader au sein du groupe, avec beaucoup de personnalité. Il prenait des décisions que l’on prendrait de l’extérieur, en regardant plus calmement le jeu. Mais il l’a fait à un si jeune âge, comme s’il comprenait le jeu avec un niveau d’intelligence supérieur. En plus de cela, il faut ajouter le fait qu’il était un très bon passeur, et qu’il avait une jolie frappe à mi-distance pour un joueur de son âge », a-t-il expliqué. On a pu le constater face au Mexique.

Enzo Fernández, en haut, quatrième à partir de la gauche, avec les Inferiores de River.

Durant ces années, tout en se donnant à fond dans le foot, Enzo « était aussi indiscipliné que n’importe quel enfant de 10 ans », a déclaré Quinteros. Lors de ses voyages à travers le pays, lorsqu’il devait dormir sur des lits superposés, « ils posaient les matelas sur le sol et sautaient du lit supérieur ». C’est fou ! Mais il existe une autre « folie » qui décrit parfaitement sa soif de vaincre. Lors d’un voyage à Neuquén en plein hiver, où la température matinale avoisinait les moins sept degrés, « Enzo est venu me dire qu’il voulait aller s’entraîner, si nous pouvions trouver un endroit pour le faire. Bien qu’il était un enfant et qu’il voulait s’amuser et passer du bon temps avec ses coéquipiers, il était également clair pour lui que, pour continuer dans cette voie, il devait s’entraîner, malgré la température négative. Et bien, nous avons fini par aller dans une église qui avait un petit terrain et, malgré le froid, nous avons fini par nous y entraîner ».

Le déclic qui a lancé sa carrière

Depuis ses débuts avec les pré-débutants, il a toujours été titulaire. Avec les débutants, aussi. « Il faisait la différence, il était toujours protagoniste », a assuré Pablo Esquivel, qui l’a découvert. « Il était au dessus des autres« , a ajouté Bruno Quinteros. Cependant, lorsqu’il est passé des Infantiles aux Juveniles, il ne jouait plus beaucoup : « Peut-être parce qu’il n’avait pas un développement physique approprié, et comme River faisait venir beaucoup de jeunes joueurs de l’intérieur du pays, il y a eu des moments où il a été plus mis de côté, où il a dû jouer dans la Liga Metropolitana au lieu du tournoi de l’AFA », a essayé de comprendre Bruno.

Un petit selfie au Monumental

À ce moment-là, il a dû mettre les bouchées doubles : « Il a commencé à s’entraîner plus dur, à aller dans un centre d’entraînement, à avoir une nutrition appropriée pour un joueur de football. En Octava (moins de 15 ans), avec Tapón Gordillo comme entraîneur, il a gagné sa place et son évolution a été terrible. En Séptima (U16), il s’entraînait déjà avec l’équipe réserve, il était déjà préparé« , explique Pablo, tandis que Bruno ajoute un autre facteur clé : « Il a toujours eu sa famille derrière lui pour être toujours présent à l’entraînement. Ce contexte familial, notamment dans les moments où il ne jouait pas si souvent, a permis à Enzo de ne pas abandonner et d’attendre sa chance ».

Après avoir fait ses débuts professionnels avec River en 2020, le joueur a été prêté à Defensa y Justicia avec l’accord de Marcelo Gallardo, qui lui a conseillé d’aller chercher du temps de jeu dans le club de Florencio Varela, présent parmi l’élite du football argentin depuis 2014.

Sous la houlette d’Hernán Crespo, autre pépite issue de la formation riverplatense, Enzo Fernández a réalisé une saison inoubliable avec le Halcón, avec qui il a remporté la Copa Sudamericana et attiré l’attention de son club formateur, qui a décidé de le faire revenir en juin 2021.

Il n’a pas fallu longtemps pour qu’il s’accapare un poste qui était resté vacant depuis le transfert d’Exequiel Palacios au Bayer Leverkusen. Avec un autre Enzo, l’expérimenté Pérez, comme guide, ils ont formé un duo qui a assuré l’ordre et l’organisation de l’équipe.

En six mois seulement, avec le titre local de la Liga Profesional 2021 en poche et de nombreuses éloges de la presse pour ses performances, le milieu de terrain a également tapé dans l’œil de Lionel Scaloni, qui l’a convoqué pour disputer les matchs contre l’Uruguay et le Brésil, dans le cadre des éliminatoires sud-américaines.

Ses performances ont également suscité la convoitise des plus grands clubs européens, dont le Real Madrid, Wolverhampton, Milan, le PSG, et Benfica. C’est finalement le club lisboète qui a décroché la timbale en faisant signer le prodige joueur argentin.

16 ans plus tard : « Pegale, vas a hacer un gol »

« Gordo, je ne t’ai pas écrit avant parce que je suis sûr que tu as reçu beaucoup de messages. L’autre jour, quand je t’ai vu entrer sur le terrain, j’ai eu la larme à l’œil. Tu le mérites. Continue comme ça, mon ami. Si tu joueras titulaire samedi, je n’ai aucun doute sur le fait que tu vas tout casser, c’est le type de matchs que tu aimes jouer ». C’est le premier message qu’Esquivel a envoyé à Enzo vendredi, la veille du match contre le Mexique, et il l’a montré à TyCSports.com. Puis, il a ajouté sa vision : « Ah, et tire de loin, je sais que tu vas marquer un but ».

Le « Gordo » a répondu quelques heures plus tard : « Merci beaucoup, mon ami !!!!. Je t’aime », avec un cœur ainsi que des mains levées. Il a également répondu à la prédiction par « Je l’espère ». Puis ce qui devait arriver arriva. Le « musicien » qui était prometteur à La Recova a accompli la prophétie et, sur sa meilleure mélodie, a marqué un des plus beaux buts de la Coupe du monde pour sceller une victoire difficile contre le Mexique qui a donné vie à l’Argentine dans la compétition.

Suite à ce match, il a gagné sa place de titulaire au sein de l’Albiceleste, et continue à jouer sa partition à merveille lors de ce Mondial au Qatar. A l’heure où j’écris cet article, l’Argentine s’apprête à affronter les Pays-Bas en demi-finale, avec Enzo Fernández qui devrait une nouvelle fois débuter titulaire pour, pourquoi pas, conduire son équipe sur le toit du football mondial.

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