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Remo – Paysandu : histoire du Re-Pa

Mécontents de leur défaite lors du Championnat d’État de 1913 face au Remo, les joueurs du Norte Club décident, en 1914, de fonder le Paysandu Foot-Ball Club, qui, quatorze jours plus tard, devient le Paysandu Sport Club. Si la première année de coexistence entre les deux équipes est marquée par une certaine cordialité, tout bascule en 1915. Cette année-là, le premier secrétaire du Remo adresse un courrier au président du Paysandu, proposant d’organiser un match dont les recettes serviraient à soutenir financièrement les équipes. En guise de réponse, les bicolores envoient une lettre truffée de termes insultants. Dans un second échange, ils acceptent finalement le défi, mais non sans y ajouter de nouvelles provocations. Excédé, le Remo met fin aux relations amicales entre les deux clubs. Ainsi débute l’une des plus grandes rivalités du football brésilien : le Re-PA.

Le Re-Pa : un siècle de passion et d’histoire

Il y a un peu plus de cent ans, dans la vibrante ville de Belém, alors troisième métropole du Brésil en plein essor grâce au commerce du caoutchouc, deux mille spectateurs se sont rassemblés dans les tribunes du stade de la société Ferreira & Comandita. Le 14 juin 1914, à 16h20, ils sont témoins du premier affrontement d’une série qui compte aujourd’hui plus de 770 rencontres : le Re-Pa, le classique le plus joué au monde. Ce public, composé de gentlemen et de dames de la haute société de la Belle Époque, est bien loin de l’effervescence populaire qui, 85 ans plus tard, en 1999, a vu 65 000 personnes remplir le stade Mangueirão pour une finale d’État mémorable. Ce même Mangueirão, dont le nom officiel rend hommage à Edgar Proença, présent lors de la fondation du Paysandu en 1914 et initiateur du vote pour choisir le nom du club – certains préférant l’appellation Team Negra FC. Ironie du sort, Proença deviendra plus tard un fervent supporter du Remo, avant de fonder la Rádio Clube do Pará en 1928.

Origines d’une rivalité mythique : la naissance du Re-Pa

Paysandu vs Remo : un duel gravé dans l’histoire du football brésilien

Si le célèbre Fla-Flu est né « quarante minutes avant le néant », on peut dire que le Re-Pa voit le jour dans des circonstances similaires. Le Paysandu est le fruit de la frustration des joueurs du Norte Club, qui ont contesté le sacre du Remo en 1913. Selon eux, des irrégularités lors d’un match nul 1-1 contre Guarany avaient favorisé les azulinos. À l’époque, le Remo, fondé en 1905, est avant tout un club de régates (de voile) – comme en témoigne son nom – et son implantation dans le football ne remonte qu’à 1913. Son siège nautique, situé rue Siqueira Mendes, se trouve à quelques pas des attractions emblématiques de la vieille ville de Belém, comme la Casa das 11 Janelas, le Forte do Castelo (berceau de la ville, sur les rives du Guajará) la cathédrale et l’église de Santo Alexandre.

Quant au nom du Paysandu, il s’inscrit dans une tradition instaurée par l’ancien maire Antônio Lemos, qui baptise les nouvelles avenues de la ville en référence à des batailles et des figures de la Guerre du Paraguay. Edgar Proença proposa ce nom alors que certains fondateurs penchaient pour Team Negra FC, en hommage au surnom du Norte Club. Cette influence se retrouve encore aujourd’hui : la ruelle jouxtant l’ancien stade de la société Ferreira & Comandita, acquis par le Paysandu en 1918, porte toujours le nom de Curuzu, tandis que sa rue parallèle s’appelle Chaco.

L’intensité de cette rivalité se reflète jusque dans la géographie de Belém : séparé uniquement par l’avenue Almirante Barroso, le stade du Paysandu se dresse presque en face de celui du Remo, connu sous le nom de Baenão, en raison de son emplacement entre les rues Mercês et Antônio Baena.

Les premières années du Clássico-Rei de l’Amazonie

La première formation du Paysandu en 1914.
La première formation du Paysandu en 1914.

Le premier but du Clássico-Rei de l’Amazonie revient à Geraldo da Mota Reimão, plus connu sous le surnom de Rubilar. Figure emblématique du Remo, il incarne parfaitement l’esprit du club, ayant lui-même fait la transition des régates vers le football, tout comme son équipe. Acteur clé de la réorganisation du Remo en 1911 alors que le club est au bord de l’extinction, il a déjà une solide expérience dans le football. En effet, il fait partie des fondateurs de l’Union Esportiva, équipe alvinegra qui remporte les deux premiers championnats paraenses avant de disparaître dans les années 1960. Pendant plus d’un siècle, cette équipe reste la seule à avoir décroché un titre en dehors du trio Remo-Paysandu-Tuna Luso. Rubilar marque d’ailleurs le tout premier but de l’histoire du football du Remo lors d’une victoire 4-1 contre Guarany, le 23 avril 1913.

Le 14 juin 1914, lors du premier Re-Pa, Rubilar ouvre le score d’un coup de tête sur corner. Peu avant la mi-temps, le Remo double la mise grâce à un but contre son camp du joueur bicolore Bayma – l’homme qui, ironie du sort, a dessiné l’écusson du Paysandu, reconnaissable à son pied ailé distinctif. En seconde période, Mateus réduit l’écart sur une passe de Guimarães, portant le score final à 2-1 en faveur des azulinos.

Le deuxième affrontement a lieu le 6 décembre, lors de la dernière journée du Championnat d’État. Remo s’impose une nouvelle fois, cette fois sur le score de 3-1, avec Antonico inscrivant le premier triplé de l’histoire du derby. Côté Paysandu, le buteur se nomme Hugo Leão, personnage clé dans la fondation du club. Dissident le plus virulent du Norte Club, il est celui qui prend l’initiative de convoquer les réunions qui mènent à la création du Paysandu.

Le 31 janvier 1915, lors du troisième Re-Pa, le Paysandu décroche enfin sa première victoire face au Remo (2-0) grâce à un doublé d’Abel Barros. Ce match marque également le premier derby disputé par Abel et son frère Antônio Manoel de Barros Filho, surnommé « Suisse » pour avoir étudié en Suisse. Lors du quatrième affrontement, le Paysandu confirme sa montée en puissance en s’imposant 2-1 après avoir été mené au score, Abel Barros étant une fois de plus décisif. L’équipe compte alors dans ses rangs Arthur Moraes, alias « le Colonel », fidèle au club jusqu’en 1931. Mais la figure emblématique du Paysandu reste « Suisse », bien que le Remo domine cette période en décrochant un impressionnant heptachampionnat (8 titres consécutifs) entre 1913 et 1919, un exploit jamais réédité au Pará.

En 1920, le Paysandu brise l’hégémonie azulina en remportant son premier titre, porté par un duo redoutable : « Suisse » et Mimi Sodré, fils du gouverneur du Pará et ancien joueur du Botafogo. Sodré a même accompagné Friedenreich lors de la première Copa América en 1916. En 1921, « Suisse » est convoqué par la sélection brésilienne en vue de la Copa América, mais il ne peut honorer sa convocation : le trésorier de la Confédération Brésilienne de Football détourne les fonds destinés à couvrir ses frais de transport maritime. Ce sera son unique opportunité avec la Seleção, car en 1922, il meurt tragiquement d’une infection causée par une écharde de crabe pourrie, combinée à une crise de malaria.

Tragédies et tensions : le Re-Pa marqué par le drame

La disparition de Suisse n’est pas la seule tragédie de l’époque. En 1921, le multi-athlète remiste Carlos Ferreira Lopes (surnommé Periçá) trouve la mort lors d’une épreuve d’apnée dans la Baía do Guajará. Son décès, survenu après sept jours d’agonie, laisse une empreinte indélébile sur le club, qui hérite du surnom de « Clube de Periçá » en son hommage. De son côté, le Paysandu reçoit le surnom de « Clube de Suisse ».

Malgré ces drames, la rivalité entre les deux clubs reste intense. Elle se scelle définitivement en janvier 1915 lorsqu’une série d’échanges épistolaires entre les directions du Remo et du Paysandu met fin à toute relation amicale. À l’origine, le secrétaire du Remo, Elzemann, propose un match caritatif destiné à soutenir financièrement les équipes. La réponse du Paysandu est cinglante, mêlant insultes et provocations. Malgré un second courrier acceptant finalement le défi, les bicolores persistent dans leurs invectives, poussant le Remo à couper les ponts une bonne fois pour toutes.

Suisse, malgré son talent, n’est pas le seul moteur du succès bicolore. Après leur sacre en 1920, le Paysandu s’impose également en 1921, 1922 et 1923, réalisant un impressionnant quadruplé. Pendant cette période, le Remo compte dans ses rangs un jeune prodige du Marajó, Estanislau Pamplona, qui rejoint le football carioca en 1923 et devient, sept ans plus tard, membre de la première sélection brésilienne à disputer une Coupe du Monde. Malgré son départ, le Remo rebondit avec un triplé en 1924, 1925 et 1926, avant que le Paysandu ne reprenne l’avantage avec un autre triplé, mené par Sandoval, futur remplaçant de Fausto au Vasco en 1931, après le départ de ce dernier à Barcelone.

Les années 1930 : records et domination partagée

La rivalité continue d’osciller au fil des décennies, chaque club dominant à tour de rôle. Les années 1930 sont relativement équilibrées, avec quatre titres pour le Paysandu, trois pour le Remo et deux pour la Tuna Luso. Toutefois, un moment marquant de cette période reste le cinglant 7-2 infligé par le Remo en 1939, avec un quintuplé de l’attaquant Jango, un record toujours inégalé dans l’histoire du Re-Pa. Cette même année, Jango signe un autre exploit sous les couleurs de la sélection du Pernambouc en inscrivant huit buts lors d’un retentissant 15-0 contre celle du Paraíba, dans le cadre d’un championnat entre sélections de chaque État du pays. Son talent suscite même les regrets du sélectionneur brésilien Ademar Pimenta, qui déclare qu’il l’aurait convoqué pour la Coupe du Monde 1938 s’il l’avait découvert plus tôt.

Parmi les autres grandes figures de cette époque, on peut citer le défenseur Evandro Almeida, qui donne son nom au Baenão, ainsi que l’ailier Vevé, futur membre de l’équipe de rêve de Flamengo en 1982.

Ainsi, dès ses premières décennies, le Re-Pa affiche déjà les caractéristiques qui vont marquer son histoire : une rivalité cyclique où chaque club domine par périodes, entrecoupées de drames, de records et de héros inoubliables.

Goleadas, légendes et hégémonies dans le Re-Pa

Dans les années 1940, le Paysandu s’affirme avec force, remportant un pentacampeonato et acquérant le surnom de « Papão da Curuzu » en 1948. Cette décennie voit le club infliger au Remo la plus large défaite de l’histoire du Clássico-Rei, un 7 à 0 en 1945 au Baenão. Entre mars 1943 et mai 1944, le Paysandu aligne neuf victoires consécutives dans le derby, une série record. Durant cette période, la Tuna Luso remporte également des titres, laissant le Remo dans sa plus longue période de disette de neuf ans. Parmi les figures marquantes de cette époque figurent Hélio Costa, meilleur buteur du classico avec 47 réalisations, et Quarenta, troisième de ce classement avec 28 buts, qui porte les couleurs du Paysandu entre 1927 et 1945.

Debout de gauche à droite : ATHENÁGORAS, Simeão, Bria, Pedro, Capivara, MANOEL PEDRO et NASCIMENTO ; Accroupis : Valentim, FARIAS, HÉLIO, GUIMARÃES et SOIÁ.
L’équipe de Paysandu parmi lesquels sept joueurs qui avaient joués lors de la victoire 7-0 (en majuscule). Debout de gauche à droite : ATHENÁGORAS, Simeão, Bria, Pedro, Capivara, MANOEL PEDRO et NASCIMENTO ; Accroupis : Valentim, FARIAS, HÉLIO, GUIMARÃES et SOIÁ.

Cependant, le Remo ne tarde pas à réagir. Lors de la transition vers les années 1950, le Paysandu connaît à son tour une période de disette de neuf ans, tandis que le Remo remporte cinq titres d’État. Parmi les figures emblématiques de cette période, on retrouve Itaguary (deuxième meilleur buteur du Re-Pa avec 30 buts), l’ailier Chaminha et le gardien uruguayen Julio Véliz. La Tuna Luso, quant à elle, remporte quatre titres entre 1948 et 1958.

L’année 1956 voit émerger un talent exceptionnel : Paulo Benedito dos Santos Braga, surnommé Quarentinha. Arrivé au Paysandu après avoir été rejeté par le Remo, il joue pendant 18 ans et remporte 12 championnats, un record au Brésil. Cette même année, le Clássico-Rei est disputé 16 fois, soit presque une rencontre toutes les trois semaines. À l’époque de Quarentinha (recordman des Re-Pas avec 135 apparitions), le Paysandu devient le club le plus titré du Pará et prend l’avantage sur le Remo en nombre de victoires dans le classico. Il fait également partie de l’équipe qui bat Peñarol 3 à 0 en 1965, exploit remarquable face à une équipe qui ne perd que contre l’Independiente par un écart similaire cette année-là, en finale de la Libertadores.

Au début des années 1970, l’idole du Remo, Alcino, émerge. Il marque les deux buts de la finale de 1971, amorçant une période dorée pour le club. Le Remo remporte alors le Nord-Nordeste et finit vice-champion de la première édition de la Série B. L’équipe accumule les succès et détient la plus longue série d’invincibilité dans le derby (23 matchs entre 1973 et 1976), établissant sa domination sur la décennie.

Parmi les figures marquantes de cette époque, on retrouve Adérson, qui allie médecine et football du côté de Flamengo, ainsi que Rosemiro, rapidement vendu à Palmeiras. En 1975, Remo affronte Flamengo au Maracanã et s’impose grâce à un but d’Alcino. En championnat national, Remo écrase Paysandu 5 à 2 en 1976, avec deux buts d’Amaral. L’idole Alcino quitte alors le club pour briller au Grêmio, et le Paysandu en profite pour récupérer la suprématie régionale.

En 1979, Bira émerge comme la nouvelle idole du Remo. Recruté à Paysandu en 77 en échange de la reconnaissance du titre de 1971, il devient meilleur buteur du championnat avec un record de 32 buts et aide son équipe à devenir triple championne, malgré la présence de Dadá Maravilha chez son éternel rival. Les deux joueurs deviennent même amis et c’est même Dadá qui recommande à l’Internacional de Porto Alegre de recruter Bira, où il remporte le Brasileirão invaincu en 1979.

Si les années 1970 sont euphoriques pour les Remistas, la décennie suivante est une véritable traversée du désert. Malgré l’émergence d’un nouveau buteur prolifique, Eduardo Soares, dit Dadinho, meilleur buteur de l’histoire de Remo, le club ne décroche qu’un seul titre d’État, en 1986. Pendant ce temps, Paysandu domine le championnat, réalisant un triplé entre 1980 et 1982, avec notamment le latéral Aldo, frère de Bira, qui connaît ensuite le succès avec Fluminense. Aux côtés de Charles Guerreiro et de Cabinho, cinquième meilleur buteur de l’histoire du club, Paysandu ajoute deux autres sacres à son palmarès dans une décennie où Tuna Luso brille également. Pour tenter d’inverser la tendance, Remo recrute l’idole bicolore Luisinho das Arábias, mais ce dernier a peu d’impact : il arrive en 1989 et, tragiquement, décède dans son sommeil peu après le début du championnat d’État.

Pour combler cette perte, Paysandu frappe fort en engageant Dadinho, qui fait une arrivée spectaculaire à Curuzu en hélicoptère. Cependant, alors que la fin des années 1980 semble annoncer une période de vache maigre pour Remo, la décennie suivante marque une renaissance éclatante. Le club réalise un triplé entre 1989 et 1991, et cette dernière année permet à Dadinho de goûter au succès avec Paysandu, qui s’adjuge la Série B grâce à un but décisif de sa part en finale contre Guarani. Mais Remo ne tarde pas à réagir : sous la direction du « Roi » Artur – futur coéquipier de Jardel dans le grand Porto des années 1990 – l’équipe atteint les demi-finales de la Coupe du Brésil, ne s’inclinant que face au Criciúma de Luiz Felipe Scolari, futur champion. En 1992, les Bicolores ripostent, portés par Edil Highlander, meilleur buteur du Brésil cette année-là. La tentative de Remo d’obtenir un inédit quadruplé professionnel est anéantie par Paysandu, qui enchaîne quatre victoires 1-0 – la dernière étant marquée par un but mémorable de Mendonça, inscrit d’une frappe lointaine depuis le milieu de terrain.

Une domination historique de Remo (1993-1997)

Les supporters bicolores ne se doutent pas qu’à partir du Re-Pa suivant, ils vont enchaîner les désillusions. Du 31 janvier 1993 au 7 mai 1995, Remo établit une série d’invincibilité de 33 classiques consécutifs, avec 21 victoires (dont six d’affilée entre août 1995 et septembre 1996, et une séquence impressionnante de neuf victoires et un match nul en 10 rencontres) ainsi que 12 matchs nuls.

Au-delà du classique, l’année 1993 s’avère mémorable. Remo atteint les demi-finales du Brasileirão, éliminant la Portuguesa de Dener grâce à une victoire 5-2 à Belém, suivie d’un succès 2-0 au Canindé. L’équipe compte dans ses rangs des joueurs de renom tels que Mauricinho (ex-Vasco), le latéral Édson Boaro (présent avec la Seleção en 1986), l’inimitable Biro-Biro (ancien du Corinthians) et l’attaquant Alex Dias. C’est aussi cette année-là que débute Giovanni, futur crack de Santos et du FC Barcelone. Son premier match entre dans l’histoire : un Re-Pa en première division, le 6 octobre 1993, qui se solde par un match nul 1-1, avec un but de sa part. Cependant, alors qu’il est pressenti pour briller dans la meilleure campagne d’un club paraense en première division (8ᵉ place), il ne parvient pas à confirmer immédiatement les attentes.

Jusqu’en 1997, cette domination absolue s’accompagne d’un pentacampeonato (cinq titres consécutifs), consolidant Remo comme le club le plus titré du Pará. Parmi les acteurs majeurs de cette époque dorée, on retrouve l’attaquant moustachu Luís Müller, le gardien Clemer, et Ageu Sabiá, surnommé « le Walter paraense », en raison de ses jambes fines et de son petit ventre, mais une efficacité redoutable. Il reste le meilleur buteur de l’histoire des clubs paraenses dans toutes les divisions du Brasileirão avec 37 réalisations.

La fin d’une série et un tournant pour Paysandu

Le 33ᵉ match de cette série d’invincibilité prend une tournure épique. Quelques jours auparavant, Remo licencie son entraîneur Fernando Oliveira, après avoir perdu la Copa Norte contre Rio Branco (AC) en plein Mangueirão – un trophée qui aurait offert une qualification pour la Coupe Conmebol. Pourtant, contre Paysandu, Belterra et Agnaldo tentent le tout pour le tout afin de renverser un match mal engagé (0-1) en remplaçant un défenseur (Ricardo) et un milieu (Damião) par deux attaquants supplémentaires, Marcelo Papi et Zé Raimundo, qui rejoignent le trio d’attaque formé par Luís Carlos Apéu, Ageu et Edil. L’audace paie : dans les 10 dernières minutes, Agnaldo égalise, Zé Raimundo donne l’avantage à Remo, et Edil scelle la victoire.

Paysandu met fin à cette série noire grâce à une inspiration superstitieuse : abandonner son maillot principal pour un maillot extérieur. Un choix qui porte chance, puisque ce jour-là, Remo manque une occasion d’égaliser sur penalty. Le gardien Claudecir, un ancien remista devenu bicolore, repousse à la fois le tir et le rebond. Si le ballon était entré, Remo aurait égalisé à 1-1, mais à la 80ᵉ minute, Wagner tue le match en marquant le but du 2-0 pour Paysandu.

Un duel de prestige à la fin des années 90

En 1997, le Papão se distingue avec le but le plus rapide du monde à l’époque, inscrit par Vital. Toutefois, le championnat d’État échappe au club, perdu sur un but de l’ancienne idole Rogerinho, qui marque l’histoire en étant le seul joueur présent dans les deux sacres de Paysandu en Série B : il est là en 2001 et remporte également la Copa Norte et la Copa dos Campeões en 2002.

L’année 2000 marque un nouvel équilibre : Paysandu et Remo comptent chacun 38 titres d’État, mais le « Re-Pa du Siècle » vient réaffirmer la supériorité azulina. En novembre 2000, Remo s’impose 3-2 (triplé de Robinho) dans un match de barrage décisif, avant un nul 1-1 au retour.

Paysandu reprend le dessus au XXIᵉ siècle

Avec l’entrée dans le nouveau millénaire, Paysandu reprend sa couronne de club le plus titré du Pará. Son effectif doré, composé de Sandro, Vandick, Lecheva, Jobson, Vanderson, Zé Augusto, Vélber, Iarley et Robgol, permet également à Paysandu d’établir une série de 11 Re-Pa consécutifs sans défaite entre 2000 et 2002, la plus longue du XXIᵉ siècle.

L’un des épisodes les plus marquants a lieu en 2001, lorsqu’Albertinho provoque Remo, alors que le match n’est même pas contre eux. Lors d’un match contre Tuna Luso, en Série B, il marque un but et, dans sa célébration, il retire son maillot pour le mettre sur la mascotte de Remo (le match se jouait au Baenão), provoquant l’hystérie des supporters bicolores.

Même en déclin à partir de 2004, Paysandu parvient à remporter cinq des dix derniers championnats d’État, tandis que Remo, encore plus en difficulté, met fin à six années de disette en 2014. Cette année-là, les deux clubs s’affrontent à dix reprises, dans une rivalité toujours aussi brûlante.

Des confrontations toujours plus intenses

Les années suivantes sont riches en affrontements épiques, notamment en Copa Verde et en Série C. En 2015, en demi-finale de la Copa Verde, Remo réalise une remontée contre Paysandu (0-2, puis 2-0), avant de s’imposer aux tirs au but. Toutefois, en finale, il s’incline face à Cuiabá après une incroyable déconvenue (victoire 4-1 à l’aller, mais défaite 5-1 au retour).

Paysandu prend sa revanche en 2017 en remportant son 47ᵉ titre du championnat Paraense après une victoire en finale face à son grand rival. En 2018, Remo reprend l’avantage avec deux victoires en finale, en plus des deux autres succès lors des phases précédentes, marquant ainsi quatre victoires consécutives surnommées « les 4 peias » par ses supporters.

Un classique qui traverse les générations

En 2019, Paysandu décroche une qualification en quart de finale de la Série C en éliminant Remo lors d’un nul 1-1, dans un match surnommé le « Re-Pa du XXIᵉ siècle ». Ce match, disputé lors de la dernière journée du Groupe B de la Série C, est un véritable choc dans un Mangueirão bouillant. Le score final de 1-1 qualifie le Papão et élimine Remo, marquant le plus grand affrontement entre les deux clubs en championnat national depuis la Copa João Havelange en 2000. Finalement, en janvier 2021, Remo prend sa revanche en s’imposant 1-0 lors du dernier grand duel en date, une victoire qui scelle la remontée du Leão en Série B après 14 ans d’absence.

Avec près de 800 matchs disputés, le Clássico-Rei de l’Amazonie est bien plus qu’une simple rivalité sportive. Il incarne l’âme du football paraense, où fierté, provocation et intensité se mêlent dans une lutte éternelle. Hier, aujourd’hui et pour toujours, Remo et Paysandu continueront d’écrire l’histoire, dans un duel où chaque match est une guerre et chaque victoire une explosion d’émotions.

Quelques chiffres sur le Re-Pa

Quand tout a commencé : le 14 juin 1914, avec une victoire 2-1 de Remo contre Paysandu dans le cadre du Championnat Paraense.

Meilleur buteur : Hélio (Paysandu) – 47 buts

Qui a le plus gagné : Remo – 269 victoires. Paysandu a gagné 247 fois. Il y a eu 263 matchs nuls.

Plus larges victoires Remo 0x7 Paysandu, 22 juillet 1945  

  • Paysandu 2×7 Remo, 05 mars 1939  
  • Remo 5×1 Paysandu, 15 octobre 1922  
  • Remo 0x4 Paysandu, 30 juin 2001  
  • Paysandu 6×3 Remo, 15 octobre 1939  
  • Remo 5×2 Paysandu, 07 septembre 1976

Curiosités et chiffres marquants

  • Paysandu compte actuellement 49 titres d’État, tandis que le Remo a 48 trophées ;  
  • Itaguary, le 2ème meilleur buteur de l’histoire du classique avec 30 buts, a réussi à atteindre ce chiffre en portant le maillot des deux rivaux, un fait très commun dans l’histoire de Remo et Paysandu ;  
  • La plus longue série d’invincibilité de Paysandu dans l’histoire du classique est de 13 matchs, entre janvier et décembre 1970 ;  
  • Belém est la ville qui a enregistré le plus de classiques Re-Pa dans l’histoire avec plus de 750 matchs. Le Clássico-Rei a également été disputé dans le Maranhão, d’autres municipalités du Pará et même à Paramaribo, au Suriname, lors de l’excursion des deux équipes en 1977. Ils y sont d’ailleurs retournés en 1984 et 2011 ;  
  • Lors du championnat de 1972, les lumières du Baenão ont été éteintes pendant quatre-vingts minutes au milieu de la discussion sur la validation ou non d’un but remista. Quand elles ont été rallumées, les filets avaient disparu et Paysandu, désireux que le match se poursuive, a ordonné à un intendant d’aller chercher des filets au Curuzu, à deux pâtés de maisons de là. Le match a pu reprendre et le Papão a remporté le titre ;  
  • D’ailleurs, la distance entre les deux stades est exactement de deux pâtés de maisons. C’est même plus proche que la distance entre les stades du Racing et Independiente, en Argentine, et au niveau mondial, seuls Dundee et Dundee United ont des terrains plus proches l’un de l’autre ;  
La distance entre le Baenão et le Curuzy
  • Une grande part de l’idolâtrie remista envers Alcino est due au fait qu’il a amené l’équipe à mettre fin à la période de vaches maigres imposées par les 18 ans de l’Ère Quarentinha. Pendant cette période, Remo n’a jamais réussi à remporté deux titres consécutifs, mais avec Alcino, le club a remporté un triplé et pris l’avantage en nombre de victoires dans le classique. Cela en grande partie grâce à une série de 23 matchs invaincus dans le classique ;  
  • Le jour de la plus grande victoire de l’histoire du classique, le 7-0 de 1945 en faveur de Paysandu au Baenão, l’un des joueur bicolores était un fervent supporter remista et un ancien joueur azulino (Izan). Et l’un des perdants a été puni (pour s’être fait expulsé et par conséquent avoir affaibli la défense remista) même dans le quartier militaire où il était installé… ;  
  • Dans un Re-Pa d’il y a plusieurs années de cela, le fantôme de Suisse (joueur mentionné au début de l’article, le seul ayant été convoqué avec l’équipe nationale à partir d’un club paraense) aurait aidé le gardien bicolore à garantir une victoire en arrêtant un penalty ;  
  • Le record de public de l’histoire du Stade Baenão a eu lieu lors de la victoire de 5-2 de Remo contre Paysandu dans le cadre du Championnat brésilien de 1976 avec 33 487 spectateurs. En plus de la victoire, les supporters de Remo ont célébré la fin de l’invincibilité de 31 matchs de leur rival cette saison-là ;  
  • Le Re-Pa est probablement le classique avec le plus grand nombre de forfaits et de polémiques de l’histoire. Il y a eu au moins 11 matchs avec forfait (la plupart parce qu’une des équipes ne s’est pas présentée au match) et plusieurs se sont terminés avant le coup de sifflet final ;  
  • Le premier forfait a été enregistré lors d’un match amical en 1919, lorsque Remo a abandonné le terrain alors que le score était de 1-1 et Paysandu a été proclamé vainqueur. Voir ci-dessous d’autres forfaits célèbres :  
    • En mars 1939, le match était de un partout lorsque Paysandu a réclamé un hors-jeu sur le but égalisateur de Remo et a quitté le terrain. Remo a gagné par forfait ;  
    • En novembre 1955, le match était une nouvelle fois de 1-1lorsque l’arbitre a accordé un penalty à Remo. Les joueurs n’ont pas laissé le penalty être tiré et Remo a gagné par forfait ;  
    • En juillet 1970, seul la première période a été disputée. Remo a retiré son équipe du terrain en signe de protestation contre la désignation de l’arbitre Teodorico Rodrigues ;  
  • Lors d’un classique de 1993, la pression des supporters azulinos était si forte au stade de Curuzu qu’une partie de la clôture s’est effondrée, blessant plusieurs supporters. Le match a dû être annulé et reprogrammé au Mangueirão quelques jours plus tard ;  
  • Entre décembre 2000 et juin 2001, Paysandu a infligé trois goleadas à son rival : 4-1, en décembre 2000 ; 4-0, en février 2001 en plein Baenão ; et 4-0, en juin 2001, une nouvelle fois au Baenão ;  
  • En avril 2009, le classique numéro 700 a eu lieu. Le Papão était en meilleure forme et son président a déclaré que le bicolore ne devait pas avoir pitié du « misérable » Remo. Contre toute attente, le Leão a gagné 2-1, avec des buts de Helinho et Beto, dans le match qui est resté connu sous le nom de « Révolte des Misérables » ;  
  • Le Re-Pa est l’un des rares classiques au Brésil qui permet encore la présence des supporters des deux équipes les jours de match.

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Steve André
Steve André
Grand amateur de football, je me suis découvert depuis plusieurs années une passion pour le football sud-américain. La ferveur, l'ambiance, la garra, l'histoire, voilà ce que je veux partager sur ce site.
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